Extrait de la nouvelle trilogie
Sorti le 8 août 1888 des entrailles de Christonia Bucharnan, Joshua avait aujourd’hui, 26 ans. À l’instar de tant de jeunes à l’époque, son avenir allait être dessiné à son insu avant d’être gravé sur des monuments dont les pierres n’étaient pas encore extraites. En ce mois de septembre 1914, le futur était inenvisageable et le présent peu enviable. Mobilisé pour et par la patrie, il serait au choix, selon le sort des armes, éventré par une baïonnette allemande, démembré par le souffle d’un obus, étouffé par un nuage de chlore ou coupé en deux par une rafale de 7.92. Seule certitude, vivant ou mort, il serait décoré. Pendant les guerres, les médailles sont aussi bon marché que la chair à canon. Elles ne se négocient plus à l’unité mais au poids. Devant Joshua Bucharnan, le no man’s land tourmenté de barbelés, de carcasses de chevaux et de squelettes humains, n’avait plus rien à envier à l’enfer. Vautré dans la boue, le nez écrasé contre un mouchoir, l’Irlandais tentait d’échapper, sinon à la guerre, à son…